Le jeudi 17 mars 2016 à Paris, l’Amcsti a organisé au Musée de l’Homme une journée intitulée « science, culture, croyance : comment en parler ? ».
Si vous n’avez pas pu y participer, voici une petite session de rattrapage.
A partir de partages d’expériences de terrain, les acteurs de la Csti ont pu s’interroger sur les situations de remises en questions de la science. Il s’agissait de trouver des outils, de réfléchir à la mise en place d’un « manuel d’auto-défense intellectuelle » pour les acteurs de la Csti, afin de faire face à la déconstruction du savoir scientifique par des discours empreints de croyances.
Une partie du programme de la journée était consacrée à des retours d’acteurs confrontés à des situations rencontrées dans des actions de médiations scientifiques. Ces retours s’articulaient autour de trois témoignages d’Anne Médard (conservatrice du Muséum d’Histoire naturelle de Marseille), de Frank Marsal (directeur du Forum départemental des Sciences – Centre François Mitterrand) et de François Gaudel (président de l’association Science ouverte). Cette discussion fait la lumière sur ces situations de remise en cause des “vérités de science”.
Les médiateurs font actuellement face à des comportements nouveaux de la part de certains jeunes et adultes, qui va au-delà du scepticisme. Il faut désormais composer avec un rejet verbalisé, une agressivité affirmée, une attaque du médiateur et de son discours de la part de cette partie du public. Parmi les sujets les plus contestés, on retrouve l’évolution de l’Homme, la sexualité, l’univers, la reproduction, le climat ou encore l’histoire des sciences.
Les médiateurs rencontrent ces situations de contestation dans les lieux dédiés à la science, mais elles peuvent aussi se manifester lorsque la science investit l’espace public. Ces contestations se font également par le biais des réseaux sociaux, des mails, courriers, vidéos, etc. La direction prise par ces discours est parfois à sens unique, le sceptique refusant toute volonté de communiquer avec le médiateur. Comment les médiateurs peuvent entamer le débat dans ces conditions ?
Plusieurs éléments ont été évoqués lors des échanges suivant ces trois témoignages. Des pistes complétées et approfondies lors de la table ronde réunissant Corinne Jegou et Magali Coupaud-Moralia (Enseignante-Chercheuse et doctorante à l’Université Aix-Marseille), Francis Duranthon (Muséum de Toulouse) Alain Epelboin (médecin anthropologue) et Etienne Klein (Philosophe des sciences et directeur du laboratoire de recherche sur les sciences de la matière).
Quelques rappels sur le rôle de l’acte de médiation ont été faits par les intervenants. Lorsqu’il y a possibilité de débattre, le médiateur doit rester professionnel et tenter de se mettre dans le raisonnement de son interlocuteur. Il faut connaître son public et ses croyances pour ainsi pouvoir adapter son discours. Autre point mis en avant, le vocabulaire utilisé par le médiateur est bien évidemment très important et donner un sens précis aux mots qu’il utilise est nécessaire pour construire un socle commun de compréhension.
Dans des situations orales plus virulentes, il apparaît nécessaire d’avoir une formation afin d’acquérir des techniques pour résister à ces échanges. Cette situation s’explique par les statuts très divers qu’endosse un médiateur. La question essentielle étant l’accès à ces formations et leur forme. Les acteurs de cette journée en sont venus à la conclusion qu’il serait judicieux d’uniformiser les statuts des médiateurs scientifiques et les formations déjà existantes qui leurs seront utiles.
Au sortir de ces échanges, de nouvelles pistes de réflexions ont été évoquées, notamment celle de développer la culture scientifique sur les médias grands publics et sur Internet. Une idée toutefois contrebalancée par Etienne Klein, considérant d’une part que la science y est déjà présente mais mal représentée et, d’autre part, que ces médias et leurs formats sont antinomiques avec le discours scientifique. La création d’une boîte à outils et d’ateliers territoriaux a également été mentionnée. Enfin, au fil des discussions et débats, d’autres volontés se sont manifestées. Il a été question d’inciter l’enseignement de l’histoire de la laïcité ou encore de mettre en place un enseignement des sciences centré sur la connaissance et la façon dont elle a été acquise et de créer un observatoire du créationnisme.
Ces pistes sont donc actuellement au stade d’ébauches. Le congrès de l’Amcsti 2016 sera l’occasion de poursuivre ces échanges afin de déterminer, d’approfondir, de concrétiser ces réflexions et propositions.
Pour revivre l’intégralité de cette journée, cette playlist vidéo regroupe l’ensemble des interventions et débats autour de ces problématiques.
Le Storify, rassemblant les faits marquants de la journée et les remarques émanant de la twitosphère, est également disponible.