Entre mise en perspective et mise en prospective, le parcours d’Évolutions industrielles n’a pas vocation à apporter de réponses tranchées mais invite à se poser de nouvelles questions, à un moment où le « grand récit de la Révolution Industrielle », suivi par celui de « l’ère post-industrielle», s’étiolent et deviennent obsolètes.
L’exposition propose de fournir aux visiteur·ses, adolescent·es et adultes, des clés de lecture pour appréhender ce sujet complexe, qui concerne tous les domaines des activités humaines, devenus plus interdépendants que jamais. Elle est une réflexion sur ce qu’est le processus d’industrialisation dans la vie des hommes et des femmes, par le prisme de notre relation aux objets techniques, au travail, aux discours. L’approche est globale (on ne s’attache pas à un territoire particulier) et transhistorique (l’industrie ne commence pas au XIXe siècle mais bien avant).
Un enjeu important consistait aussi à trouver le moyen d’intéresser nos publics (et plus particulièrement notre jeune public) à une question souvent considérée comme rébarbative et rattachée « au passé », alors même que nous habitons une société hyper-industrielle.
Les partis pris muséographiques de cette exposition
Le·la visiteur·se découvre les métamorphoses des visages de l’industrie, à travers une succession d’expériences sensibles, sonores et visuelles. L’idée ici était de concevoir une expérience de visite qui permette au visiteur et à la visiteuse non pas de faire mais de ressentir, d’éprouver, d’être troublé. Ce sujet mobilise essentiellement les sciences humaines, qui se prêtent peu à la muséographie hands on, de « manipes », traditionnellement proposée dans les centres de sciences.
Souhaitant s’adresser à un public à partir de 14/15 ans, qui n’est pas forcément attiré par la lecture de textes longs et livresques, le parcours évite autant que possible une approche trop didactique et trop aride. La visite repose sur des expériences contemplatives et immersives portées par une série d’installations artistico-didactiques, à la croisée de l’installation artistique, du design d’interaction et / ou du numérique. Elle mise sur l’évocation et la surprise, même si ces installations ont aussi pour objectif d’illustrer ou de servir de supports aux informations scientifiques.
L’une des composantes importantes du projet est l’environnement sonore. Le son constitue un élément scénographique à part entière et chaque espace bénéficie d’un traitement sonore particulier. Les étroites collaborations mêlant équipe de conception, comité scientifique et artistes issu·es de disciplines pas forcément habituelles dans nos expositions (cirque, musique, théâtre, street art et design numérique) ont formé le socle du parcours muséographique.
Les réactions des visiteur·ses
Une étude qualitative a été menée par Pavages en novembre et décembre 2022. Elle comprend la réalisation d’observations et d’entretiens avant et après la visite. 34 personnes ont été interviewées, réparties dans 25 entretiens. 20 premiers entretiens ont été menés auprès de jeunes âgé·es de 13 à 29 ans et 5 derniers auprès de 7 enseignant·es venu·es pour 5 d’entre eux et elles, accompagné·es des classes.
Les principaux registres de réception sont expérientiels, esthétiques, cognitifs et éthiques. L’exposition apparaît comme une expérience. Elle saisit les visiteur·ses dès l’entrée en sollicitant les sens et en stimulant les perceptions par l’accumulation d’images fortes proposées par les diaporamas introductifs. La présence d’objets et d’un appartement témoin touche l’affect en participant à l’incarnation sensible du propos de l’exposition : « L’appartement, c’était assez intriguant et assez perturbant parce que ça ressemble à la maison de quelqu’un. » (lycéenne, 16 ans).
Les points forts de l’exposition résident dans son approche originale du sujet, aussi bien sur la forme que sur le fond. La scénographie convainc par sa force immersive ; le traitement par les sciences humaines et sociales surprend mais emporte globalement l’adhésion, surtout pour les plus jeunes. L’exposition séduit, frappe les esprits et fait réfléchir. Si le sujet est perçu comme concernant tout le monde, l’exposition est toutefois estimée difficilement accessible par tous·tes, du fait du caractère implicite de son propos.
La grande richesse d’informations et de points de vue qui engendre le questionnement plutôt que le fait d’acquérir des connaissances a été bien perçue. Elle a également été décrite comme une exposition « coup de poing », qui alerte et fait prendre conscience, engendrant parfois des émotions ambiguës (inquiétude, sentiment d’impuissance). Enfin, elle apparaît légèrement originale par rapport aux traitements classiques des expositions à la Cité des sciences et de l’industrie, plus « positivistes» et est perçue comme plus « artistique » qu’à l’accoutumée.
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