Les sciences, un levier fort de transformation et d’attractivité pour le collège du Neuhof à Strasbourg

Du partage des sciences à l'engagement citoyen - 40 ans de politiques de CSTI
© NUNC Architectes_Perspective concours

Miser sur les sciences pour redonner du sens au parcours éducatif des enfants d’un Quartier Prioritaire Politique
de la Ville (QPPV), bâtir un établissement à l’identité propre
et à l’attractivité renouvelée à l’échelle de Strasbourg,
refonder
la carte scolaire pour favoriser la mixité sociale, évaluer au long cours les effets d’un projet architectural
et éducatif hors
norme, bâtir des réponses exportables peut-être à d’autres collèges de France… Tel est le défi que la Collectivité européenne d’Alsace (CeA) et ses partenaires institutionnels ont souhaité relever en ouvrant un collège des sciences à l’horizon de septembre 2025.

Un nouveau souffle pour un collège public de QQPV

Le quartier du Neuhof se situe à la limite Sud de Strasbourg. Son visage est multiple : « Neuhof-village » - l’ancien faubourg, la « Cité jardin » - classée monument historique, « Neuhof-Cités » - caractérisé par ses grands ensembles d’habitat social des années 1960 et par la plus forte concentration de logements sociaux de l’agglomération. Dans ce quartier, enclavé, le collège Solignac classé REP + (Réseau d’Education Prioritaire), cumule les difficultés : la majorité de ses élèves sont boursiers, son taux de réussite au brevet est bien en-deçà de la moyenne académique, son taux d’occupation est de 63 % (375 élèves pour un collège 600 places), son taux de fuite est de 28 % (167 élèves du secteur ont recours aux dérogations), son bâti vieillit…

Pour agir en profondeur sur cette situation, les conseillers d’Alsace actent le projet d’un « nouveau collège du Neuhof », premier acte d’un « plan de transformation des collèges publics alsaciens », lequel exprime une ambition d’excellence éducative afin d’offrir des conditions de réussite à 360° à chaque enfant. La construction de l’établissement neuf de 600 places sur le site en reconversion de l’ancien hôpital militaire Lyautey concerné par le programme national pour la rénovation urbaine (NPNRU), s’intègre dans son quartier en proposant d’utiliser ses locaux au-delà du temps scolaire.

Par ailleurs, forts de l’expérience du Vaisseau - qui promeut depuis 15 ans les sciences, la culture scientifique et les techniques de manière ludique et interactive auprès de la jeunesse - toujours ouverts aux initiatives inspirantes venues d’ailleurs, comme celle de la MISS (Maison d’Initiation et de Sensibilisation aux Sciences de l’Université de Paris-Saclay),  les élus et les différentes directions de la CeA (immobilier, éducation et jeunesse, sports, environnement…) se mobilisent pour formuler un projet d’accompagnement éducatif novateur et exemplaire autour des sciences, en concertation avec l’Education nationale, la Préfecture, l’Eurométropole et l’Université de Strasbourg, entre autres.

Les sciences comme levier de réussite pour la jeunesse

Formuler des hypothèses, mener des expériences, manipuler, s’autoriser à échouer, réussir individuellement
et collectivement… Les élèves ont besoin d’acquérir les connaissances et les compétences permettant de résoudre les problèmes, d’évaluer les données probantes, de donner du sens à une information complexe provenant de diverses sources.  Une pratique et une bonne compréhension des sujets liés aux sciences, à la technologie, aux mathématiques, etc., permettent de développer ces compétences et préparent les jeunes d’aujourd’hui aux défis du futur. 

Viser un projet d’excellence scientifique, c’est donc partager l’ambition de donner aux élèves de quartiers défavorisés le pouvoir de comprendre le monde, de s’émanciper, de s’insérer professionnellement, de trouver une utilité sociale tout en construisant sa citoyenneté autour des valeurs de la République, d’effectuer un parcours de vie réussi.

La valorisation d’espaces de pratique et la mobilisation des universitaires dans un enseignement « pair à pair » complémentaire de celui du collèges ont deux facteurs essentiels.

Faire un « pas de côté » pour donner corps au collège public de demain

Pour donner corps à ce projet éducatif, les autorités académiques se sont engagées dans un collège en expérimentation pour 3 ans (Art. 34 - Loi d’orientation et de programme pour l’avenir de l’Ecole -  avril 2005) portant sur l’enseignement des disciplines scientifiques, l’interdisciplinarité, l’organisation pédagogique de la classe…, s’appuyant sur les travaux de la recherche en éducation, des études sociologiques et de psychologie cognitive, envisageant pour partie des postes à profils et la présence de chercheurs doctorants au sein de l’établissement.

La CeA, quant à elle, a requestionné les référentiels architecturaux classiques du bâti scolaire, en cherchant à traduire l’ambition éducative donnée dans l’architecture du nouveau collège et en créant ou proposant :

  • le renforcement du lien parents-collège et la prise en charge des difficultés des élèves avec une surface de vie scolaire plus importante que la moyenne ;
  • un pôle de sciences sur un même étage, avec en son centre un Fab Lab et des salles spécifiques et modulables permettant des pédagogies différenciées et un travail particulier sur l’inclusion SEGPA et ULIS (premiers utilisateurs du Fab Lab) ;
  • une salle des personnels unique pour « faire corps » (professeurs, administratifs, agents techniques de la collectivité…) ;
  • un Espace 3 C - Centre de Culture et de Connaissances (plutôt qu’un CDI classique) favorisant le travail en autonomie ou en groupe, ainsi que les pratiques numériques encadrées et spontanées ;
  • une « transition douce » du CM2 à la 6e avec une implantation des salles de classe de 6e proche de celle des primaires ;
  • l’intervention d’une scénographe associée au Maître d’œuvre lauréat du concours pour travailler une « mise en scène » du collège fonctionnelle et pédagogique, qui mettra en avant la vocation du lieu, tout en apportant aux élèves des connaissances sur un mode ludique et décalé.

Pour ce faire, l’énergie provient du collectif, de la concertation et de la co-construction menée par la CeA avec le Rectorat, l’Eurométropole de Strasbourg (EMS), les partenaires scientifiques d’ores et déjà engagés comme l’Université de Strasbourg et le Vaisseau, mais aussi avec les usagers. Ainsi, pour les associer dès le démarrage du projet, une résidence de plusieurs semaines des étudiants designers du DSAA In Situ Lab du Lycée Le Corbusier d’Illkirch qui, avec les outils propres au design, ont imaginé avec les élèves et l’équipe pédagogique de l’actuel collège Solignac, mais aussi avec les acteurs et les habitants du Neuhof, ce que pourrait être le « collège de demain ». Dès 2023, des réunions de concertation amorceront la révision de la carte scolaire et tout au long du projet, des réunions publiques auront lieu avec les partenaires et les habitants. 

A ce jour, le futur collège du Neuhof est le premier collège de France soutenu par l’Agence Nationale pour la Rénovation Urbaine (ANRU). C’est dire s’il est d’ores et déjà reconnu comme pièce structurante de la dynamique de rénovation urbaine profonde et nécessaire que connait ce territoire. 

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